06 février 2008

Rescrit impérial sur la construction d'un nouveau Japon


Nous accueillons aujourd'hui une nouvelle année. Je songe ici aux orientations prises pour notre pays qu'au début de son règne l'Empereur Meiji nous indiqua sous la forme du Serment en cinq articles :

Nous créerons à tout niveau des assemblées représentatives, et nous prendrons toutes les décisions après débat.

Humbles et puissants formeront un seul cœur et nous conduirons une politique de prospérité.

Depuis les fonctionnaires et les militaires jusqu'au peuple, nous ferons en sorte que chacun accomplisse ses propres aspirations sans décourager personne.

Nous abolirons les coutumes désuètes, et nous nous comporterons conformément à la Grande voie du Ciel et de la Terre.

Nous poursuivrons le savoir dans le monde entier, et renforcerons ainsi les fondements de notre Empire.

Quelle sagesse et quelle magnanimité ! Que dire de plus ? Votre Empereur renouvelle ici cet engagement de frayer la voie à l'avenir de notre pays. Animé de cette volonté, nous délaisserons les coutumes désuètes et donnerons tout leur élan aux aspirations populaires et nous nous engagerons, avec le concours du gouvernement et du peuple, dans la voie du pacifisme et construirons une civilisation riche sur le plan des Arts et des Lettres, élevant ainsi le niveau de vie de tous pour construire un nouveau Japon.

Les dommages qu'ont subis les villes, grandes et petites, du fait de la guerre, les souffrances endurées par les victimes, le marasme économique, la pénurie alimentaire, l'accroissement du chômage..., cette situation déchire véritablement le cœur. Toutefois, il faut faire face aux épreuves auxquelles est confronté aujourd'hui notre pays et décider de rechercher avec une inébran­lable résolution la civilisation au sein de la paix ; si l'on maintient cette orien­tation, il ne fait aucun doute que s'ouvrira non seulement pour notre pays, mais pour l'humanité tout entière, la perspective d'un chemin radieux.

Je constate que les Japonais nourrissent un amour particulièrement sincère pour leur famille comme pour leur pays, mais le temps est venu désormais d'ouvrir plus largement notre cœur et de développer un amour pour l'en­semble de l'humanité en nous engageant de toutes nos forces dans ce sens.

Il me semble qu'en raison de la défaite, qui a mis un terme à un long conflit, la population tend à se laisser emporter par l'irritation et à plonger dans les affres du désespoir. La violence a tant duré que le sens de la vertu s'en est trouvé affaibli et je m'inquiète profondément des signes de la confu­sion des esprits que j'observe.

Toutefois, je suis avec vous, mon peuple, et je souhaite partager tou­jours avec vous profits et pertes, joies et peines. Les liens qui m'unissent à vous, mon peuple, reposent sur une relation de confiance et de respect mutuel, ils ne se réduisent pas à de simples mythes ou légendes. Ils ne repo­sent pas non plus sur les conceptions fantasques qui font de l'Empereur une divinité révélée et des Japonais un peuple supérieur à tous les autres ou des­tiné à dominer le monde.

Mon gouvernement doit s'efforcer par tous les moyens dont il dispose de trouver les meilleures solutions pour adoucir les peines et les souffrances du peuple. Je nourris en même temps l'espoir que, pour se redresser face aux difficultés de l'heure et surmonter les peines actuelles, notre peuple luttera pour redresser l'économie ainsi que les Arts et les Lettres. Notre peuple sait maintenir une grande cohésion dans la vie sociale, il pratique l'entraide et le secours mutuel, et il nourrit un sens de la tolérance qui le porte à la généro­sité. Je souhaite que l'on développe ces traditions sublimes dont nous n'avons pas à rougir. Je suis certain que ces qualités permettront à notre peuple de contribuer considérablement au bien-être de l'humanité.

Les résolutions pour l'année entière se prennent le jour de l'An. Je prie pour que nous n'ayons qu'un seul cœur, Vous, mon peuple en qui j'ai confiance, et votre Empereur, et que chacun d'entre nous donne le meilleur de lui-même et ne ménage pas sa peine afin de réaliser cette grande entre­prise.

Hirohito

1er janvier de l'an 21 de l'ère Shôwa

(Traduit par Pascal Griolet.)

[source : M. Lucken, A. Bayard-Sakai, E. Lozerand, Le Japon après la guerre, Editions Philippe Picquier, Arles, 2007]


Le dossier sur l'histoire de l'Asie orientale au XXème siècle


Aucun commentaire:

Mes vidéos