06 février 2008

Rescrit impérial sur la fin de la guerre de la Grande en Asie orientale




Nous portons ici connaissance à nos loyaux et bons sujets qu'après avoir mûrement considéré les grandes tendances de ce monde comme la situation présente de notre Empire, nous souhaitons procéder au règlement de la crise actuelle en recourant à une mesure d'ordre exceptionnel.

Nous avons ordonné au gouvernement de l'Empire de signifier à l'Amérique, l'Angleterre, la Chine et l'Union soviétique notre consentement à leur déclaration commune.

En effet, n'avoir pour seul dessein que d'assurer la quiétude des sujets de l'Empire et partager avec les pays de la Terre les joies d'une commune pros­périté, tel est le modèle à suivre légué à Nous par Nos ancêtres depuis la fon­dation de l'Empire, modèle auquel Nous n'avons eu de cesse de Nous appliquer fidèlement. La déclaration de guerre envers l'Amérique et l'Angleterre trouvait en fait sa source dans notre désir le plus cher d'assurer la propre survie de Notre Empire et la stabilité de l'Asie orientale et il n'était pas à l'origine de Notre intention de violer la souveraineté d'aucun pays étranger ni d'envahir aucun territoire. Cependant, quatre années de guerre se sont déjà écoulées et bien que chacun ait agi de son mieux, malgré la vaillante lutte de Nos soldats, de Nos marins et de leurs chefs, l'activité assi­due de Nos fonctionnaires de toutes catégories, ou le service dévoué de Nos cent millions de sujets, la situation militaire n'a pu prendre une tournure favorable et l'orientation générale de ce monde n'est pas non plus à notre avantage. De surcroît, l'ennemi, faisant nouvellement usage d'une bombe particulièrement cruelle, n'a de cesse de massacrer des innocents et les dévas­tations s'avèrent à la vérité incalculables. Poursuivre les combats pourrait non seulement aboutir à l'extinction de notre race, mais encore à l'anéantissement de la civilisation humaine. Comment pourrions-Nous alors protéger Nos innombrables enfants et Nous racheter devant les âmes divines de Nos ancêtres impériaux? C'est la raison pour laquelle Nous en sommes venus à faire accepter au gouvernement impérial la Déclaration conjointe [de Potsdam]. Nous ne pouvons qu'exprimer nos regrets envers les diverses nations alliées qui ont coopéré avec l'Empire à l'émancipation de l'Asie orientale. Nous avons le cœur brisé lorsque nos pensées se tournent vers les sujets de cet Empire qui tombèrent au champ d'honneur, ceux qui sont morts en accomplissant leur devoir, ceux qui connurent une fin prématurée, ainsi que les familles qu'ils laissent. D'autre part, les conditions de vie des blessés de guerre, de ceux que le malheur a frappés, de ceux qui perdirent maison et emploi, font l'objet de Notre profonde sollicitude. A y penser, les épreuves que l'Empire devra endurer ne seront pas de celles qu'il connaît habituelle­ment et Nous sommes tout à fait conscient de la tristesse que vous, Nos sujets, pouvez ressentir. Néanmoins, c'est en accord avec la marche du temps et du destin que Nous exprimons le désir d'ouvrir une ère de Grande Paix pour toutes les générations à venir en souffrant l'insouffrable, en supportant l'insupportable. Ayant ainsi réussi à préserver l'intégrité de l'Etat-impérial [kokutai], Nous plaçons Notre confiance en votre parfaite sincérité, vous Nos bons et loyaux sujets aux côtés de qui Nous Nous tiendrons constamment. S'il arrivait que l'émotion fût source d'emportements menant à de fâcheuses extrémités, ou encore que des luttes fratricides rendissent les temps troublés au point que vous vous mépreniez sur la Grande Voie à suivre et perdiez la confiance du monde, Nous vous avertissons que cela ne serait pour Nous nul­lement tolérable. Que toutes les générations à venir qui forment une unique famille dans toute cette nation se transmettent la foi solide dans le caractère indestructible du Pays des dieux, que le poids des responsabilités vous rap­pelle le long chemin à parcourir, que toute votre énergie se dirige vers la construction de l'avenir, soyez d'une moralité irréprochable, d'une constance inébranlable dans vos choix, faites le serment d'entretenir haut et fort l'es­sence du kokutai et engagez-vous à ne point prendre de retard sur l'évolution du monde. Puissiez-vous, Nos sujets, être l'incarnation de Notre volonté.

Hirohito

Le 14 août de l'an 20 de l'ère Shôwa

(Traduit par Jacques Joly.)

[source : M. Lucken, A. Bayard-Sakai, E. Lozerand, Le Japon après la guerre, Editions Philippe Picquier, Arles, 2007] [Photo : MacArthur et Hiro-Hito]


Le dossier sur l'histoire de l'Asie orientale au XXème siècle


Aucun commentaire:

Mes vidéos